Salade de Fruits

Parfois, il ne faut pas chercher à comprendre, surtout en matière de goût. Certains aiment les plats en sauce, d’autres les sushis… moi, ce sont les fruits. J’adore les fruits. Je suis frugivore. Tout cela a commencé très tôt. Quand j’avais 6 ans, le seul fruit qui comptait, c’était la fraise. Puis très vite, je suis passé aux cerises car j’adorais monter aux arbres. Chez mon grand-père, je pouvais passer des heures dans le cerisier, au fond jardin, à boulotter ces délicieux fruits rouges. Pire qu’un sansonnet ! Quand repu, je redescendais à terre, allez hop, un petit détour par les groseilles, histoire de varier les plaisirs. Il n’y a pas de mal à se faire du bien. A la fin du mois d’août, les abricots et les prunes prenaient le relais.

C’est ainsi que mon enfance se passait, toujours à l’affût lors de la belle saison. Puis l’adolescence me rattrapa et avec elle, son lot de changements en tous genres. Ainsi, vint alors s’ajouter aux fruits des jardins de mon enfance, que je continuais bien sûr à déguster,  une note d’exotisme : les bananes. C’était super, on pouvait en plus en manger toute l’année. Et cette passion pour les bananes, je ne le savais pas encore, elle n’allait plus me quitter pendant des lustres. A tel point que pour mes vingt-cinq ans, je m’en souviens encore comme si c’était hier, on m’offrit pour mon anniversaire le kit complet du bananophile que j’étais devenu : des magnets, des autocollants, un porte-clés, une peluche, un livre de recettes… bref j’étais officiellement reconnu par mes proches et mes pairs comme l’expert de la bananosphère. Pour dire, j’en mettais même dans mes croque-monsieur ! Un must.

Une fierté assurément, qui me laisse, aujourd’hui encore, un souvenir ému… quand on est jeune, on aime tous les excès. On se dit que ce goût si fort et prononcé pour la banane ne vous quittera finalement jamais et c’est vrai que ça a duré. Mais rien n’est éternel sur cette bonne Terre et un jour, le divorce fut prononcé… Je n’ai rien vu venir.

Était-ce écrit, prémédité ? Le hasard n’existe pas, c’est bien connu.

Une passion en remplaçant une autre, ce fut un 2 décembre.

Un jour somme toute des plus ordinaires… mais peut-être pas tant que ça car ce 2 décembre-là, la banane fut mise à bas de son piédestal : connue pour être défendue, elle s’offrit à moi avec une telle passion. Je découvrais la Pomme.

Une pomme ronde, sublime, ferme, affolante, une promesse de mille délices… une pomme si irrésistible qu’elle fit naître en moi une envie infinie : celle de la croquer, encore et encore. Ce que je fis une première fois, une deuxième, puis dix, cent, mille fois… plus encore ! J’en perdais la raison.

Je me disais : quoi de mieux qu’une pomme pour vieillir en bonne santé ? Le proverbe lui-même le dit : pomme du matin éloigne du médecin. On se sent invincible.

Et puis patatras, des temps troublés arrivèrent… à cause du réchauffement climatique ou d’un virus planétaire, qui sait, une terrible nouvelle tomba. Je m’en souviendrai toute ma vie, c’était un 4 avril. Il me fut annoncé que la saison des pommes était finie… c’était sans appel, fin de l’histoire !

Effondré, désespéré, et finalement n’en voulant plus d’autres pour la remplacer, je perdis donc le goût des fruits…