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Eclatobulle

Un jour, une route...

8 Mars 2012 , Rédigé par livre.eclatobulle.over-blog.com Publié dans #A la vie...

 

Ce matin-là, un beau soleil s’était levé. La chambre, qui était à l’étage, donnait à l’est et à travers les volets, il n’était pas rare que ce dernier vint m’éveiller. Je suis sorti hors du lit, sans bruit, en glissant sur les draps de soie, sans la réveiller. Je suis descendu et je me suis affairé. J’étais d’humeur légère et je décidai d’aller me balader.

 

Derrière la fenêtre, je regardai le ciel bleu et pour immortaliser l’instant, j’ai fermé les yeux. J’étais bien... Et il a suffit de quelques secondes...

 

En rouvrant les yeux, un épais brouillard s’était formé, dense et très enveloppant... Tout était gris. C’était à peine croyable :

 

“Diable !” lançai-je pour moi-même.

 

Je suis sorti de la maison pour tenter d’y voir plus clair, pour comprendre les raisons de cette soudaine apparition et je me suis perdu.

 

C’est en tout cas ce que je pensais. J’étais seul dans cette insinuante vapeur froide et dense, car je ne croisai le chemin de personne mais cette solitude, pour autant, ne m’inquiétait plus. C’est sans doute pour cette raison que je n’ai pas paniqué. Je n’avais pas envie de crier “Au secours !”, ni d’attendre là, sans bouger que ce voile opaque disparaisse. Non !

 

J’ai marché en déchirant la brume de tout mon être, telle une lame humaine aiguisée par une pierre de souffrance absurde, fendant l’âme vaporeuse de la terre.

 

Après un temps dont j’ignorai la durée car je ne portai plus de montre, j’ai trouvé une route.

 

De ce côté-ci de la route, la terre était à nue et en marchant, chacun de mes pas soulevait un nuage de poussière blanche. De l’autre côté de la route, je constatai qu’une herbe verte, grasse et des fleurs poussaient partout...

 

Le brouillard s’était dissipé et
j’ai su en mon for intérieur que c’était LA route !

 

En cet instant, je ne savais pas où je me trouvai mais ne sachant plus où aller, je m’y suis engagé...

 

Sur cette route, il y avait des gens, comme moi. Tous marchaient dessus, dans la même direction. Sur leurs visages, pas de sourire ni d’émotion... Leurs yeux noirs, si différents des miens, regardaient l’horizon et tous avançaient sans bruit, leurs pieds ne produisant aucun son au contact de la route. Je remarquai ce détail.

 

De ces personnes, je n’en connaissais aucune et je me suis dit qu’en marchant, je pourrais faire connaissance et il me serait alors facile de demander mon chemin pour rentrer auprès des miens. Où étaient-ils ?

 

Je me suis alors mis à marcher sur la route et tout en cheminant, je me suis tourné vers l’homme qui se tenait à ma gauche. Je l’interpelai !

 

“C’est une belle route, n’est-ce pas !” dis-je

 

“Oh ça... oui, pour sûr !” répondit-il

 

“Où mène-t-elle ?” demandai-je

 

“Je n’en ai aucune idée, déclara-t-il mais elle me permet d’avancer alors j’avance ! J’imagine qu’il en est de même pour toi, comme il en est d’ailleurs pour tous ces gens qui nous entoure”.

 

Je rétorquai. “As-tu remarqué ?”

 

L’air étonné, “Non, quoi donc ?” reconnut-il.

 

“Regarde !” D’un geste du bras, je lui montrai. ”De ce côté-ci de la route, il y a de l’herbe. Entre les touffes bien grasses, des fleurs poussent en nombre, multicolores et odorantes. De ce côté là de la route, la terre est à nue. Rien n’y pousse, pas même un lichen ou une mousse... Séparant les deux, il y a la route, posée là comme un trait d’union ou comme une cicatrice entre ces deux mondes qui ne se ressemblent plus. Jadis, j’en suis sûr, l’un et l’autre étaient semblables et d’une richesse infinie. Ces fleurs sont belles, tu ne trouves pas ? Il me plairait d’en cueillir mais... Il me semble que la route a coupé en deux ce qui autrefois ne faisait qu’un. Je ne suis pas sûr que cette route soit une bonne chose, finalement, je doute... en acceptant d’emprunter cette route, je cautionne son existence mutilante !”

 

“Tu doutes ? me lança l’homme ! La route est ce qui nous fait avancer, tu ne dois pas la critiquer. Sans elle, nous serions perdus. Sans elle, comment saurions-nous dans quelle direction il nous faut cheminer ? Regarde tous ces gens ! Que feraient-ils sans cette route que tu incrimines si méchamment ?”

 

Cette route était-elle un mal nécessaire...

 

“Qui la construite, le sais-tu seulement ?” questionnai-je encore !

 

“Non, je n’en ai aucune idée. Mais ce que je sais, c’est qu’il est facile d’avancer grâce à elle. Je ne dois pas faire d’effort”. L’homme semblait un peu énervé à présent.

 

J’osai toujours. “Tu te souviens du jour où tu as emprunté la route, pour la première fois ? Moi, je viens tout juste de m’y engager”.

 

“Non !” m’annonça-t-il. “Il m’est impossible de m’en souvenir... Je sais que je viens de là-bas, loin derrière, c’est tout ce dont je me rappelle”.

 

“Tu ne t’en rappelles pas ?” J’avais peine à le croire “C’est étrange, non ? Qui es-tu ?”

 

“D’où je viens, qui j’étais... non, je ne m’en rappelle pas non plus, mais je sais que ce n’est pas important. Ce qui est important, c’est qui je suis là, tout de suite, maintenant. Ce qui m’est essentiel, c’est que je sois, ici et que j’avance ! Mais pourquoi me poses-tu tant de questions ? m’envoya-t-il. La route est droite et nous voyons loin devant nous. Il n’y a pas d’obstacle ! Je ne me pose aucune question et je suis heureux ainsi. Laisse-moi tranquille avec toutes tes questions idiotes auxquelles il n’existe pas de réponse... va t’en, affreux homme avant que je ne crie et que tous se joignent à moi pour t’éjecter de la route !”

 

Je n’insistai pas et je regagnai la solitude de mes pensées, un peu désolé de n’avoir obtenu aucune réponse à mes interrogations.

 

J’ai marché. Combien de temps, je l’ignore. A de nombreuses reprises, j’ai voulu quitter cette route mais pour où aller ? A gauche dans l’herbe verte parmi les fleurs pour y disparaître à tout jamais... ou à droite dans le désert et le vide pour m’y perdre à l’infini... En fin de compte, je restais sur la route car j’avançai.

 

Et même si je n’en voyais pas la fin, je gardai espoir. Oui, j’espérais voir finir cette route car plus j’avançais, plus j’avais la certitude que ces deux mondes si différents ne feraient à nouveau qu’un seul... quand la route finirait !

 

J’ai longtemps marché, jusqu’à en oublier qui j’étais et d’où je venais. Cela n'avait plus d'importance. J'étais et c'est tout ce qui m'importait.

 

Un jour, la route s’est arrêtée. Sous mes yeux noirs, une prairie multicolore ondulait sous la caresse d’un vent léger. Il y avait des fleurs partout et un doux soleil baignait de lumière mon visage.

 

J'étais arrivé et tu étais là, tu attendais !

 

Epilogue

 

Il suffit parfois d’une simple route pour séparer ce que l’on pensait hier encore être inséparable. Et même si l’on ignore pourquoi cette route existe, il est important de s’y engager pour avancer. Et quoi qu’il y ait au bout du chemin, prairie ou désert, avancer signifie simplement... croire et essayer !

 

 

Derrière des yeux noirs,


brille toujours un espoir

 

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