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Eclatobulle

Les frères DD - Journée nocive

16 Mai 2011 , Rédigé par livre.eclatobulle.over-blog.com Publié dans #Essai

En introduction, je voudrais juste rendre à Lili ce qui lui appartient, à savoir la paternité partagée de l'idée qui est à l'origine de cette fiction. Car s'en est bien une !

 


Les frères DD - Journée nocive

 

Sophie Delacourt était une jeune femme de trente-trois ans. Un mètre-soixante cinq pour cinquante-quatre kilos, Sophie était assez jolie et avait pour habitude de prendre soin d’elle et de son apparence. Maubeugeoise de naissance, elle avait quitté le cocon familial à dix-neuf ans pour faire “son droit” à la Catho, sur Lille.

 

Son diplôme en poche en juin 2000, elle était partie durant onze mois aux Etats-Unis avec Mathilde sa meilleure amie, elle aussi fraîchement diplômée. De retour en France, Sophie avait travaillé quelques temps pour un cabinet d’avocats où elle avait rapidement montré l’étendue de son talent. Puis un autre… et encore un autre… En quatre ans, sa réputation était faite et elle était devenue l’avocate en vogue sur la Métropole lilloise, spécialisée dans les divorces compliqués. Le marché semblait infini et très lucratif.

 

Longtemps, elle avait habité le vieux-lille, rue basse dans une chambre de bonne, au cinquième étage sans ascenseur. Elle en était partie le jour où elle avait adopté Marcus. Marcus était un adorable bouledogue français. La chambre de bonne était de fait devenue trop petite pour elle et son Marcus.

 

C’est à Villeneuve d’Ascq qu’elle trouva son pied-à-terre, une petite maison SEDAF, avec jardin, achetée à bon prix à l’un de ces clients pressé de vendre. Avec son bouledogue français, cela faisait maintenant cinq années qu’elle vivait là, à trois enjambées du parc du Héron : la ville à la campagne, c’était pour elle l’endroit rêvé.

 

Sophie croyait à l’envie, mais pas à l’amour. Voilà pourquoi à trente-trois ans, Sophie préférait papillonner plutôt que de se ranger...

 

Alors qu’autour d’elle, ses amies pouponnaient, même Mathilde avait fini par s’y mettre, Sophie, elle, sortait le soir avec... donnait rendez-vous à… pour un brunch sous la couette, partait en vacances aux Maldives ou à Papeete avec …

 

Cette vie-là lui plaisait bien, et Marcus ne posait jamais de question, mais alors jamais !

 

Sophie était une femme libre dans sa tête comme dans son corps. Pourquoi s’ennuyer à supporter la puérilité masculine ou pire, une jalousie teintée d’amour suintant la guimauve...

 

****************

 

C’était un mardi d’octobre. Le temps était frais et il avait plu dans l’après-midi. Sophie était rentrée tôt, elle était stressée. L’un de ses clients s’était emporté, l’avait insulté suite à un jugement qu’il estimait injuste. Il avait menacé de ne pas en rester là, de ne pas la payer, ce n’était rien. Elle avait l’habitude.

 

Des situations de crise, elle en avait déjà géré de plus compliquées mais elle n’aimait pas cela. De retour chez elle, elle se changea rapidement, laissa traîné sa robe sur le canapé et enfila un tee-shirt, un bas de jogging, une veste en polaire et chaussa une paire de tennis.

 

Comme chaque jour, Marcus faisait la fête à Sophie. Mais d’instinct, il savait aussi que le retour tôt en soirée et le changement de vêtements de sa maîtresse signifiait une balade au parc. Et cela, Marcus adorait.

 

Le petit chien redoubla d’entrain.

 

Sophie passa la laisse autour du cou de Marcus, ouvrit la porte d’entrée et tous deux s’engagèrent dans la rue. Elle fourra la clé dans sa poche et se dirigea d’un bon pas vers le parc non loin. L’air était effectivement assez frais et au parc, elle ne croiserait pas grand monde... tant mieux, un peu de solitude et d’air frais feraient leur effet. Elle planifia dans l’instant d’ouvrir une bouteille de chardonnay à son retour.

 

Après quelques minutes, Sophie entra dans l’une des allées du parc. Le jour commençait déjà à décliner mais on y voyait encore bien. Elle disposait d’une heure au moins avant que la nuit commence vraiment à tomber. Sophie ne s’était pas trompée, il n’y avait pas grand monde qui se promenait au parc ce soir.

 

De temps à autre, un joggeur croisait son chemin. Elle laissa son esprit vagabonder. Marcus s’arrêtait parfois pour soulager un besoin, puis ils se remettaient en route. Les pas de Sophie bruissaient sur le chemin de gravillons blancs.

 

Soudain, l’attention de Sophie fut attirée par un bruit. Derrière elle, quelqu’un marchait en raclant ses pieds sur les gravillons. Elle se retourna et elle vit qu’une personne marchait là-bas, non loin… un homme probablement à voir sa carrure, dont le visage était dissimulé par la capuche de son survêtement.

 

Sophie oublia bientôt sa présence et elle replongea dans ses pensées. Demain, une dure journée l’attendait car elle plaidait une affaire délicate. Une histoire de divorce qui au départ semblait assez banale, quoi que… mais qui prenait petit à petit des proportions assez inquiétantes. D’importants enjeux financiers étaient venus compliqués la séparation et un imbroglio juridique était en train de se constituer. Il fallait absolument qu’elle vérifie la recevabilité d’une nouvelle pièce versée au dossier. Elle commencerait par cela demain, oui…

 

Sentant comme une présence, Sophie se retourna brusquement en faisant un écart. La silhouette encapuchonnée était à présent à une dizaine de mètres derrière elle. Sophie prit inconsciemment peur. Elle regarda devant elle et accéléra le pas, d’instinct. Le pas de la personne derrière accéléra aussi.

 

Donnant à droite et à gauche des coups d’œil pour jauger la distance entre elle et cette personne, elle espéra que rapidement un joggeur croiserait sa route. “Encore un malade qui n’a rien d’autre à foutre !” pensa-t-elle.

 

A l’approche d’une passerelle qui enjambait une pièce d’eau, elle s’arrêta en s’accoudant à la balustrade. Peut être que cette personne allait passer son chemin en la voyant s’arrêter… Il n’en fut rien.

 

L’homme, car sa stature laissait clairement supposer qu’il s’agissait bien d’un homme, stoppa sa marche et fouilla dans ses poches. Il sortit un téléphone portable et Sophie put voir du coin de l’œil qu’il semblait envoyer un message car il pianotait sur le clavier du petit appareil.

 

Manifestement, cet homme la suivait. Sophie n’était pas rassurée et elle scruta une nouvelle fois les alentours à la recherche de quelqu’un à qui elle pourrait se coller, même de loin… au moins, elle ne serait plus seule dans le parc. Elle se remit en marche et s’engouffra sur le chemin de gauche, à la descente de la passerelle. L’homme se remit en marche à son tour. Plus de doute possible, Sophie était suivie et elle paniquait à présent.

 

Que devait-elle faire ? Se retourner et faire face ? Courir et se sauver mais Marcus… impossible de courir avec lui, même si elle le prenait dans les bras.

 

En plus, Marcus était tout sauf un chien pour se défendre… il n’avait jamais fait de mal à une mouche. D’ailleurs, peut-être l’homme en voulait-il à son chien ? Un bouledogue français était un chien de race, et à l’époque, elle l’avait acheté mille neuf cent euros. C’était un mâle en plus, il avait une certaine valeur…

 

Sophie connaissait bien le parc et elle savait que bientôt, elle déboucherait sur un grand espace herbu. Elle pourrait traverser et regagner rapidement une rue de l’autre côté, vers la salle de sport du Sart. Là, il y avait des chances qu’elle trouve la porte ouverte et des personnes à l’intérieur jouant au squash ou au badminton.

 

Sophie tira sur la laisse de Marcus qui stoppa net sa marche. Elle lâcha un cri… ‘Ah non Marcus ! Viens !” lança-t-elle au chien qui rechigna. Elle tira plus fort et Marcus se remit en marche… heureusement.

 

Heureusement, oui, Sophie aperçut un homme non loin devant qui venait de débouler sur sa droite, mais il lui tournait le dos. Machinalement, elle se mit à courir vers lui, entrainant dans sa course le pauvre Marcus qui n’en pouvait plus :

 

“Monsieur, monsieur !” cria-t-elle.

 

Rapidement arrivée à sa hauteur, elle lui agrippa l’épaule. Elle était sauvée…

 

“ Monsieur, excusez-moi, je suis suivi par…”

 

L’homme tourna la tête, et Sophie se figea d’effroi. Sur le visage de l’homme, elle vit un rictus infernal... celui de sa propre mort. L’homme la frappa violemment à la tête et Sophie s’effondra...

 

Lorsqu’elle reprit connaissance, Sophie avait les yeux bandés. Elle était nue, allongée à même le sol, les mains attachées derrière le dos. Sa tête lui faisait horriblement mal. Elle gigota.

 

En la voyant bouger, quelqu’un se leva d’une chaise et s’approcha. On la prit par les épaules pour la redresser et on la fit asseoir en tailleur, les jambes écartées. Une main caressa son entrejambe.

 

Sophie cria : “Non, ne me touchez pas !” Elle tenta de serrer les cuisses mais la personne écarta à nouveau ses jambes. Il s’éloigna.

 

Sophie savait que l’homme était là et qu’il la regardait.

 

“Laissez-moi ! Qui êtes-vous ? Pourquoi faites-vous ça ?


Vous voulez de l’argent ? Laissez-moi partir ! Ne me faites pas de mal…”

 

Sophie hurlait, appelait au secours. Elle avait rapidement le souffle court et elle était terrifiée. Personne ne lui répondit. L’homme était là, mais il ne disait rien.

 

***********************

 

Oui, Dick était là et il se régalait en silence. Il avait bien choisi, le fourbe. C’était une belle femme, avec des seins bien ronds, des beaux cheveux, des jolies jambes et un sexe bien large dans lequel il avait déjà glissé les doigts et avec lequel il allait bien s’amuser… mais pas maintenant !

 

Il devait encore attendre un peu et pendant qu’il patientait, il aimait profiter de ce spectacle, avant de commencer. Dick attendait Denis, son frère.

 

Dick, dont le surnom était Pitbull, avait un frère : Denis, dit le fourbe.

 

A deux, ils étaient à l’humanité ce que sont


les décharges sauvages à la nature.

 

Pitbull et le fourbe habitaient Lillers, dans un taudis légué il y a longtemps par leur mère. Dick et Denis, les frères DD comme on les appelait parfois dans le quartier, avaient tous deux une passion, un hobby.

 

Depuis quatre ans, Dick aimait peindre… avec son sang. Il peignait nu, en extase. Ainsi, il s’écorchait et plongeait le pinceau à la source même de son sang. Quand il perdait connaissance, c’est Denis qui le ramassait et le soignait.

 

Le fourbe, lui, aimait la chasse, depuis toujours. A priori, il s’agissait là de deux passions inconciliables et pourtant, l’une et l’autre avaient fini par s’accorder dans l’esprit malade du fourbe.

 

Cela faisait un an maintenant, depuis que Pitbull avait cessait d’utiliser son propre sang pour peindre à cause de problèmes de tension, qu’ils travaillaient en équipe. Pour assouvir leur passion respective, l’un rabattait et l’autre attrapait : ca marchait à tous les coups. C’est Denis, avec son esprit fourbe, qui avait une nouvelle fois eu l’idée.

 

La technique était toujours la même. Denis commençait par suivre une proie et il la rabattait lentement vers le Pitbull. Quand cette dernière se croyait enfin sauvée, Dick frappait ! C’était net et sans bavure avec le Pitbull.

 

“Il est malin, le fourbe !” pensa le Pitbull en regardant la fille. Oui, la nature avait doté son frère d’un esprit fourbe et calculateur. Dans quelques minutes, ils allaient profiter ensemble de ce corps. D’abord à deux, puis ensuite, Pitbull l’écorcherait pour peindre… il le désirait ! En plus, il avait déjà le sang du chien, ca changerait pour une fois, il mélangerait.

 

Epilogue

 

Après plusieurs mois d’enquête, la police judiciaire classa sans suite le viol et le meurtre de Sophie Delacourt, faute d’indices pour retrouver le meurtrier.


************************

 

Un soir de mai, joli mois de mai, le pitbull retourna se promener, dans un autre parc... L’envie de peindre était une nouvelle fois la plus forte...

 

Trois jours plus tard, alors qu’une peinture séchait au balcon du 6, rue des Croix Chats à Lillers, la Voix du Nord titra :

 

”Appel à témoins ! Disparition de Marion Jourdan !”

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