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Eclatobulle

Cœur de Lumière... Etosha Pan

25 Mai 2011 , Rédigé par livre.eclatobulle.over-blog.com Publié dans #Il y a longtemps...


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Cœur de Lumière... Etosha Pan


Depuis trois jours, la pluie s’abattait sans cesse sur la savane.

 

“D’ordinaire en cette saison, la terre est sèche et l’air étouffant !” pensa l’homme au chapeau blanc en regardant la mare qui s’était formée au bas des marches menant à la maison. Il se tenait debout sous l’avancée et avec l’index de la main droite, il tapotait nerveusement la rambarde de bois devant lui. Soudain, il prit conscience de ce tic qui trahissait sa nervosité et arrêta. Il fourra les mains dans ses poches et il se força à rester immobile. La pluie régulière voilait tout alentour et il ne vit les phares de la voiture qui approchait que lorsque cette dernière s’engagea dans l’allée.

 

Il sentit son rythme cardiaque qui accélérait. Elles arrivaient. Sa bouche était plus sèche et il se força à déglutir. Le X5 noir stoppa à quelques mètres de la mare. Elles étaient là et l’homme au chapeau blanc ne bougea pas. Il baissa le menton et plissa légèrement les yeux, creusant un peu plus encore les rides du lion sur son front.

 

La porte côté conducteur du X5 s’ouvrit et la corolle d’un parapluie couleur bordeaux s’épanouit au-dessus de l’ouverture. Il entendit jurer à l’intérieur de la voiture puis la porte du côté passager s’ouvrit à son tour. Un second parapluie, noir quant à lui, apparut.

 

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Cela faisait quinze ans que Greg n’avait pas revu Irène et Léa et dans quelques secondes, elles allaient descendre de cette grosse voiture noire.

 

Oui, il y avait quinze ans, Greg avait disparu, il s’était comme volatilisé, du jour au lendemain, sans rien dire à personne, même pas à sa mère qui en était morte de chagrin, à force de ne pas savoir ce qu’était devenu son fils.

 

Irène et Greg avaient été mariés et Léa était la fille unique du couple. En 1994, Greg, dont les sentiments commençaient à s’user, avait préféré partir. Un soir de mai, il n’était pas rentré, en laissant tout derrière lui.

 

Il était parti pour rejoindre Emmy Douglas, une amie, à Okaukuejo, en plein cœur du parc d’Etosha, en Namibie. Emmy avait des relations un peu partout, et grâce à elle, Greg avait pu quitter le pays sous une fausse identité : Antoine Delarue. Il vivait là et tout le monde le connaissait là-bas sous le nom de Monsieur Antoine. Il consacrait sa vie à l’écriture et à l’accueil des quelques touristes fortunés qui venaient pour un safari photo très privé. A l’occasion, il les emmenait dans des endroits que lui seul connaissait, là où la lumière sur Etosha Pan ne ressemblait à nulle autre sur terre.

 

Greg partageait désormais la vie de Emmy, de loin car l’un comme l’autre tenait à son indépendance. C’était une femme comme on en rencontre peu. Elle avait en charge la gestion administrative du parc, considéré comme un des principaux sanctuaires de la vie sauvage africaine. Ce parc avait été proclamé Réserve nationale en 1907. Le cœur du parc était le Etosha Pan, ce qui signifiait "place d’eau séchée", et qui correspondait en fait à une grande cuvette d’environ cinq mille kilomètres carré.

 

Cette grande dépression blanche était l’endroit des mirages et l'occasion d'apercevoir des troupeaux d’animaux sauvages était fréquente. C’était un endroit absolument unique où le merveilleux côtoyait le sublime. La lumière y était exceptionnelle.

  

Quinze ans...

 

Greg était sur le point de retrouver deux des femmes qui avait compter dans sa vie d’homme : Irène et Léa. Léa avait huit ans quand il était parti. C’était une petite fille gaie, vive et pétillante. Greg aurait donné sa vie pour elle. Partir ainsi en la laissant avait été la décision la plus difficile qu’il n’avait jamais pris… mais il devait d’abord penser à lui. Tous le lui disaient. Il avait été tenté pendant des mois de revenir, et puis le temps avait passé... Aujourd’hui, il allait découvrir une jeune femme de vingt-trois ans...

 

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“Lâche ! Ce n’est qu’un lâche !” Voilà ce qu’avait pensé Irène lorsque la police et la gendarmerie arrêtèrent les recherches pour tenter de retrouver Greg.

 

Greg avait disparu le 6 mai 1995 et depuis, elle avait assumé seule l’éducation de leur fille, pendant un temps. Puis elle s’était remariée avec Stéphane, un cadre, brillant pensait-elle de lui, qui travaillait chez Alcatel lui aussi. Ils avaient eu ensemble une petite fille, Zoé. Irène était heureuse.

 

Bien sûr, Léa avait grandi et Stéphane était un gentil beau-père. Elle et sa mère étaient très complices. Léa demandait régulièrement conseil à sa maman et inversement, Irène se confiait souvent à sa fille. Chaque année, depuis l’année des seize ans de Léa, elles avaient pris l’habitude de partir toutes les deux, en voyage. Les années impaires, c’est Irène qui décidait de la destination et les années paires, c’était Léa qui choisissait.

 

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En juin 2010, Léa emmena sa mère en voyage. Et le secret avait été bien gardé jusqu’au jour J... Léa avait simplement dit à sa mère : “Tu fais ces vaccins là et tu prends tes appareils photos, on m’a parlé d’une lumière incroyable, comme il n’en existe nulle part ailleurs sur terre !”

 

Le vol était parti en retard, à destination de Windhoek et la route avait été longue depuis l’aéroport. Irène avait conduit sous une pluie battante. Lorsque le GPS avait annoncé : “Vous êtes arrivé à destination”, Irène avait engagé le véhicule sur un chemin de terre détrempé et avait stoppé la voiture à quelques mètres seulement de la résidence... et d’une grande flaque d’eau. Malgré la pluie, elle constata avec plaisir que c’était un bel endroit. Il y avait de belles pelouses, de grands arbres, de jolies fleurs. “Dommage, cette grande mare à l’entrée !” pensa-t-elle.

 

Un homme au chapeau blanc se tenait là sous l’avancée et il attendait. “J’espère qu’il parle français !” avait lancé Irène à sa fille. Léa la rassura car on le lui avait affirmé. Elles ne prêtèrent pas attention à son visage. L’une comme l’autre remarqua malgré tout qu’il n’était pas très grand. Une fois descendues de la voiture, elles pressèrent le pas pour se mettre rapidement à l’abri sous l’avancée de la maison. Elles étaient fatiguées.

 

“Pfeuuuh, quel temps ! Merci monsieur de nous avoir attendu si tardivement, l’avion a décollé avec trois heures de retard !” expliqua Irène à l’intention de l’homme au chapeau blanc alors qu’elle et Léa gravissaient les trois marches qui menaient à l’avancée.

 

L’homme au chapeau blanc releva la tête et leurs regards s’échangèrent. Le temps arrêta sa course...

 

Greg constata qu’Irène avait à peine changé. Ses boucles blondes et folles encadraient toujours son beau visage. Ses yeux gris bleus merveilleux lancèrent des éclairs. Irène lâcha : “Greg ? On te croyait mort !”

 

Léa regarda l’homme au chapeau blanc et dis plus bas, les yeux déjà mouillant de larmes :

 

“Mon petit papa ?”

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